L'Edito, par Jean-Marie Pelt
Le manuel du plancton
Pierre Mollo et Anne Noury Éditions Charles-Léopold Mayer (ECLM), avril 2013
Le nom de Pierre Mollo apparait à plusieurs reprises dans la bibliographie et la filmographie de cet ouvrage. C’est dire que les auteurs de ce livre sont engagés depuis longtemps dans l’étude de la mer et du plancton.
Ce livre nous offre un panorama très complet sur le phytoplancton et le zooplancton, bases des chaines alimentaires de la vie marine. On apprend ainsi par exemple qu’un kilo de poisson nécessite la consommation de plus de 100 kilos de plancton animal et de plus de 1000 kilos de plancton végétal. Ces informations nous sont données à travers des encarts qui allègent le texte mais sont toujours d’une grande précision et dont la lecture suscite un vif intérêt. Le lecteur amoureux de la vie marine... et de la vie tout court, trouvera dans ce livre toute information utile concernant notamment la systématique et l’écologie des plantes et animaux planctoniques.
En bon terrien que je suis, j’avoue mal connaître le milieu marin bien que grand amoureux de la mer. Je conserve ce livre très précieusement auprès de moi car j’y vois une véritable somme des connaissances sur le plancton. Autrefois, les sommes étaient censées offrir aux lecteurs la totalité du savoir sur un thème. C’est bien ici de cela qu’il s’agit, une somme de surcroît jamais assommante mais toujours passionnante, peut-être aussi parce que les auteurs ne nous ont pas privés de notes et d’anecdotes toujours très suggestives.
Je souhaite à ce livre tout le succès qu’il mérite et en ferai mon livre de référence sur la thématique du plancton.
Président de l’Institut Européen d’Ecologie
Professeur Honoraire de l’Université de Metz
Du plancton en rade de Brest
Plancton du monde est heureux de vous inviter à la Journée de la Rade de Brest, qui se tiendra à Océanopolis le 8 juin prochain.
L'accueil se fera par Bienvenue à Bord, de 9h30 à 18h, et de nombreux exposants viendront présenter leurs activités en rade.
A cette occasion, le parc de découverte des océans organise une conférence de 14h30 à 17h, à l'auditorium. Cette conférence est ouverte à tous :
Une plongée sous-marine commentée lancera le départ de la conférence.
De nombreux intervenants viendront présenter leurs travaux et partager leurs connaissances. Au programme : les usages maritimes de la rade, sa biodiversité, son microclimat... et bien d'autres sujets encore !
Cette journée sera aussi l'occasion pour les plaisanciers de découvrir le plancton et de réaliser eux-mêmes des prélèvements. Des filets à plancton seront distribués, et les échantillons prélevés seront observés et commentés tout au long de la journée.
Le programme complet est disponible sur le site d'Océanopolis
L'Edito de Vagabond
Pour la deuxième année consécutive, le voilier polaire Vagabond est en hivernage au sud de l'île Ellesmere, au Nunavut, territoire inuit du Canada.
Il y a quelques semaines, quelques uns de nos amis inuits de Grise Fiord me sollicitaient pour des cours de plongée sous-marine ! Pour le moment, c'est la nuit polaire et les températures sont un peu dissuasives...
Alors quelle chance d'avoir à bord l'équipement nécessaire à l'observation sous-marine sans devoir s'immerger totalement ! Grâce au microscope et au filet à plancton fournis par Océanopolis, nous espérons pouvoir vous envoyer régulièrement des images des petits habitants du détroit de Jones. La principale contrainte sera de trouver une fracture ou de faire un trou suffisamment grand pour y glisser le petit filet.
Nous utiliserons également un hydrophone et une caméra étanche pour écouter et filmer sous la banquise.
Pour mieux connaître l'Arctique, sentinelle du climat mondial, toutes les formes d'observations se complètent. Aux travaux de glaciologie, d'océanographie et de météorologie qui nous sont confiés chaque hiver et aux missions d'été que nous accueillons à bord de Vagabond chaque été depuis l'année 2000 (géologie, biologie...), l'étude de la vie planctonique s'impose !
A bientôt sur vagabond.fr et plancton-du-monde.org !
Eric Brossier
Quelques photos du plancton de Grise Fiord
L'Edito de Bernard Stamm
Forum « Plancton du monde » 2012
Le projet « Plancton du monde » a vu le jour il y a six ans et vise à faire découvrir au grand public et aux professionnels de la mer, la diversité du plancton. Il est porté par Océanopolis, parc de découverte des océans à Brest, avec le soutien de la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme (FPH).
Cette année, Océanopolis et la FPH ont organisé un forum pour permettre aux différents acteurs de se rencontrer et de discuter de problématiques liées au plancton. Les enjeux et connaissances actuelles ont également été développés.
L'édito #13
Par Paul & Anne-Marie Jorion
Le naufrage du Rena, un porte-conteneurs dont la cargaison de pétrole continue de fuir en ce moment-même dans une baie splendide de Nouvelle-Zélande, malgré de premiers efforts de pompage, nous rappelle que les « ennemis » du plancton ont de multiples visages.
Rappelons-nous que la survie du plancton détermine en bout de chaîne celle de tous les êtres vivants qui s’en nourriront soit directement, soit se nourriront de mangeurs de plancton, ou de mangeurs de mangeurs de plancton. Notre alimentation dans son ensemble dépend du maintien de la biodiversité et le plancton, garant de la biodiversité marine, est essentiel au maintien de notre propre vie.
Les transports maritimes emportent dans leur ballast un grand nombre d’espèces planctoniques (essentiellement végétales. De telles migrations involontaires sont susceptibles de causer une prolifération de certains ennemis du plancton, dont le meilleur exemple est offert par les mnémiopsis, des cténophores (que l’on confond souvent à tort avec les méduses) originaires d’Amérique du Nord et qui ont désormais atteint la mer Caspienne et la Mer Baltique. Elles ont découvert là un terrain favorable à leur croissance, ce qui leur permet d’atteindre un diamètre de 20 cm, soit le double de leur talle habituelle. Leur appétit pour le plancton animal de petite taille (les copépodes ou les larves de mollusque, par exemple), qu’elles gobent en permanence, met en danger l’équilibre marin. Plus ces mnémiopsis sont grosses et plus, bien entendu, elles mangent ! Ce sont elles qui avaient provoqué, une catastrophe du même ordre dans la Mer Noire au début des années 1990.
Autres menaces bien connues : les nitrates, phosphates et pesticides chimiques (herbicides) utilisés non seulement dans l’agriculture mais aussi dans l’entretien des terrains de golf ou le nettoyage des routes et des voies ferrées. Les terres agricoles étant constamment lessivées par les pluies et le ruissellement aboutissant nécessairement aux océans, les effets nocifs de ces polluants peuvent se faire sentir à plus de 300 km de leur lieu d’origine. Ce ruissellement peut conduire par exemple au développement de planctons toxiques, comme les dinoflagellés, qui impactent alors notre alimentation en rendant impropres à la consommation les coquillages (huîtres, coques etc.) qui se nourrissent de ces planctons.
Évoquons aussi, parmi les ennemis du plancton, le gaz carbonique, produit par la combustion du charbon, du bois et du pétrole, dont le dégagement dans l’atmosphère conduit à une augmentation de la température des eaux de surface mais aussi des eaux profondes, entraînant des changements dans la composition du plancton animal. Comme celui-ci cesse de reconnaître son environnement, il se déplace vers des eaux plus froides, provoquant des déséquilibres dans la biodiversité des différentes régions : les poissons ne trouvant plus le plancton dont ils se nourrissent ordinairement, disparaissent des zones maritimes où on les rencontrait jusque lài, à la recherche de leur aliment de prédilection.
Merci aux chercheurs, aux pêcheurs en mer, aux conchyliculteurs, qui par leurs prélèvements de plancton, nous aident à surveiller et à protéger la planète. Merci à Plancton du Monde et à Planète Plancton de nous maintenir constamment informés.
Nous n’avons mentionné ici qu’un faible échantillon des déséquilibres que les activités humaines causent à la reproduction et à la diversité du plancton, il n’est pas trop tard heureusement pour agir.
Pour visionner le global café avec Paul Jorion, c'est par ici
L'EDITO # 12
Par Pierre Vuarin,
Fondation Charles Léopold Mayer
Cher(e)s ami(e)s,
Quelques photos de la mission de Pierre Mollo (plancton du monde) et Julien Gonnet (rongead) au Tchad avec Koliyang Palebele (pdt de l'orga paysanne CNPRT) . Ils ont rencontré les femmes qui collectent la spiruline naturelle. Ils ont aussi rencontré des pêcheurs de ce pays. Ils leur ont donné l'occasion de voir la spiruline et le plancton de différents lacs avec des petits microscopes.
Un moment fort pour ces femmes, pêcheurs lorsqu'ils ont pu découvrir la vie dans l'eau et ont compris la nécessité de la préserver avec les paysans et tous ceux qui vivent autour de ces sources d'eau. Un moment fort aussi pour Pierre Mollo qui découvrait un des lieux de production naturelle de la spiruline avec des personnes qui appartiennent à ces cultures humaines qui l'ont préservé depuis des centaines d'années.
Le seul fait de voir peut permettre de changer son regard sur le monde. C'est un début pour pouvoir réflèchir, penser, délibérer et agir. Mais c'est un moment de déclic.
Une étudiante espagnole lors de la réunion de Valencia (sur la création de l'Universite Internationale Terre Citoyenne) après la présentation de Pierre Mollo sur le plancton, tenait à peu près ce propos :
"A l'université, on nous demande avant tout de comprendre de manière intellectuelle avec un grand détour théorique qui peut être très lourd. On nous dit que c'est la condition sine qua none de la compétence et de l'action. Mais je vois à travers cet exemple que le fait de voir, de sentir peut transformer le regard que l'on porte sur le monde, sur son travail. Cela peut être une motivation pour chercher à comprendre et à agir. C'est un déclencheur pour la mise en action."
Cette présentation, cette réaction de l'étudiante, nos échanges ont permis aussi de bien remettre en évidence dans notre projet d'UITC l'importance du temps d'approche par les sens, (voir, sentir, gôuter, écouter, toucher...) l'expression et le partage de nos sentiments, surprises pour créer les conditions du changement de regard sur une réalité, pour créer motivation, confiance, connaissances nouvelles, pour créer les premières conditions pour pouvoir agir...
A réfléchir dans le cadre de nos projets.
L'EDITO # 11
Par Valentin KHOLODOV,
Chercheur à l’Institut de Biologie des Mers du Sud
Académie Nationale d’Ukraine (Sébastopol)
Pourquoi j’ai trouvé intéressant de traduire L’ENJEU PLANCTON
Pour des Russes et Ukrainiens
[...] Souvent nous parlons des ressources biologiques marines, des espèces d’importance économique, des problèmes de protection et de conservation des ressources marines. Mais on oublie d’habitude que ces ressources ne sont pas stables comme des pierres. Elles sont toujours en état de destruction et de reconstruction. Mais pour la reconstruction, il faut consommer constamment la matière organique qui a été synthétisée par des communautés planctoniques. Le Plancton, c’est une source de la vie de l’Océan, une source qui fabrique la nourriture et l’énergie pour tous les réseaux trophiques des mers et des océans. Par ailleurs, les compositions qualitatives et quantitatives des communautés planctoniques caractérisent l’état d’un écosystème maritime, sa santé et ses maladies. C’est clair, mais on parle très peu de ces sujets.
Il faut dire que dans la littérature scientifique russe destinée au grand public, nous avons des lacunes et peu de livres traitant des questions ci-dessus ou des problèmes liés au réchauffement du climat, à l’acidification de l’eau de mer, aux problèmes des mangroves etc. Les universités de Russie et d’Ukraine donnent des cours d’aquacultures marines, de pêches marines etc. Mais les enseignants s’adressent à l’IBSS, leur demandant d’écrire des livres traitant des techniques de la mariculture[1], des problèmes d’exploitation rationnelle des ressources marines. Notre Institut a donc décidé de créer une série de livres destinés à la formation de professionnels de la mer. On réfléchissait au n°1 de la série. Le livre de mes collègues et amis Maëlle Thomas-Bourgneuf et Pierre Mollo m’a paru idéal pour ouvrir cette série. Pour « travailler la mer », il faut être bien informé sur les multiples questions et problèmes propres aux professionnels de la mer. Il faut avoir une culture générale et bien spécifique, une culture d’Univers Marin. C’est pourquoi j’ai proposé d’abord au directeur de l’IBSS, l’Académicien Valery Eremeév puis au Conseil Scientifique de l’IBSS de prendre ce livre comme n°1 de la série éducative. Cette proposition a été admise en unanimité.
Le Numéro 2 de la série sera consacré à l’Elevage de moules et d’huîtres en mer Noire / Guide pratique. Auteurs : Valentin Kholodov, Anna Pirkova, Ludmila Ladyguina.
Actuellement la traduction russe de L’enjeu plancton est sous presse. Il faut noter que Les Éditions Charles Léopold Mayer et les auteurs nous ont cédé gratuitement les droits de traduction en langue russe, ce qui nous permettra de vendre le livre avec un prix « grand public ».
Et pour finir, je voudrais souhaiter aux auteurs de cet ouvrage intéressant, utile et passionnant – Maëlle Thomas-Bourgneuf et Pierre Mollo – beaucoup de nouveaux succès et à tous les partisans et artisans des mers «un peu d’amour de la mer et un peu de solidarité entre les hommes ».
Bon vent pour l’année 2011!
[1]Littéralement « culture dans la mer ». Terme utilisé par les pêcheurs pour les différencier de l’aquaculture dite « industrielle ».
L'EDITO # 10
Par Jean Yves Collet
La cuisine au plancton, c'est bon !
L'intérêt du plancton des océans et des rivières est désormais reconnu par l'ensemble de la communauté scientifique planétaire. Il se trouve que je termine tout juste une série de deux films sur le plancton pour la télévision, et j'avais bien cru faire un tour assez complet de la question. Mais c'était sans compter sur l'inventivité planctonique insatiable de Pierre Mollo : « Jean-Yves, je viens de faire quelques tests culinaires avec un grand chef pour tenter d'inclure du plancton végétal directement dans note alimentation de tous les jours. C'est super ! Serais-tu partant pour faire un petit film sur le sujet ? Océanopolis, la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l'Homme et l'Observatoire du Plancton de Port-Louis sont prêts à nous donner un coup de main.» Ne serait-ce qu'à l'idée de faire côtoyer la science et la cuisine (en plus je suis gourmand), j'ai immédiatement répondu par l'affirmative.
Quelques semaines plus tard les tournages commencent : Pierre Mollo est mis à contribution en tant que spécialiste du plancton, Marc Foucher en tant que chef de cuisine (Meilleur Ouvrier de France 2004 ça ne gâche rien, non ?), et le Dr. Bernard Schmitt, endocrinologue et nutritionniste réputé, directeur du CERNh (Centre d'Enseignement et de Recherche en Nutrition Humaine) de Lorient, en tant que caution médicale.
Quelques mois plus tard, le film est terminé : il fait presque 30 minutes et s'intéresse à trois espèces de plancton végétal bien particulières : la spiruline, la chlorelle et l'odontelle. Ces algues planctoniques microscopiques, comestibles et cultivables, présentent des qualités nutritionnelles de premier ordre : protéines, vitamines, oligoéléments, acides gras oméga 3... et sont surtout connues jusque là comme compléments alimentaires. Les essais culinaires du chef Marc Foucher et de Pierre Mollo sont un étonnant succès de saveurs et de couleurs. Le Dr. Bernard Schmitt, grand partisan de la (bio)diversité alimentaire, est littéralement enthousiasmé par cette nouvelle approche culinaire : « non seulement c’est possible, mais en plus c’est bon, et en plus c’est sain ! ». En ouvrant des perspectives culinaires et nutritionnelles particulièrement intéressantes, le plancton végétal pourrait bien représenter dans l'avenir un enjeu de taille en alimentation humaine, tant dans les pays du nord que dans ceux du sud.
Jean Yves Collet est réalisateur - scénariste.
Plus d'informations sur www.jeanyvescollet.com
L'EDITO # 9
Par Allain Bougrain Dubourg
Le Plancton
« Malheur aux plus faibles » tel est l’enseignement porté par l’histoire. L’infiniment petit n’a, par conséquent, que peu de chance de trouver la place méritée… même lorsqu’il est infiniment nombreux ! Pire, l’homme de la rue sait-il ce qu’est le plancton ? Pas sûr. A l’évidence, avec une belle tête de panda, la diatomée aurait trouvé grâce dans nos consciences.
La France, deuxième puissance maritime mondiale, n’a politiquement pas porté le message en faveur de ce nanovivant dont nous dépendons. Le constat est d’autant plus regrettable que, dans les laboratoires, de nombreux scientifiques furent parmi les meilleurs connaisseurs au monde et ne manquent pas d’alerter sur les conséquences désastreuses d’un mépris.
En vérité, une question simple se pose : que pouvons-nous faire, vous et moi, en faveur du plancton ? La réponse ne manque pas de complexité ! Nous n’allons pas créer un « Planctonthon » à l’instar du Téléthon, pas plus que nous n’allons l’inscrire sur les listes rouges de l’UICN. On pourrait cependant être tenté par une piste : l’inscrire au patrimoine mondial de l’humanité. Cette démarche ne manquerait pas de générer la curiosité, voire la responsabilité.
En attendant cet improbable avènement, les initiatives qui sont prises ici ou là, pour sortir le petit peuple des mers de son ghetto, méritent un hommage appuyé. Car elles ne permettent pas seulement d’enrichir nos connaissances, elles affirment, avant tout, le devoir de solidarité. Que serions-nous, en effet, sans l’infiniment petit ? Inexistants, tout simplement.
L'EDITO # 8
Par Yves Le Gal
Sous-Directeur honoraire au Collège de France
La face cachée de la biodiversité.
La « biodiversité » n’est plus un gros mot. Tout personnage politique ou médiatique se doit aujourd’hui d’en parler sinon savamment du moins abondamment.
Encore faudrait-il s’accorder sur le terme « biodiversité ». Il n’y a pas une biodiversité mais des biodiversités. L’océan est un espace stable et relativement homogène (au regard du temps géologique) si on le compare aux espaces terrestres. Il s’y développe peu d’effets de niche et la diversité des organismes (visibles avec nos yeux) y est relativement faible. La richesse des océans c’est tout abord celle des grands groupes (comme par exemple les Echinodermes) toujours présents et uniquement là depuis des centaines de millions d’années.
Il existe aussi une autre biodiversité océanique : celle de l’infiniment petit, celle du peuple des « micro » et des « nano » : virus, bactéries, microalgues, champignons, protozoaires et bien d’autres que nous ne connaissons pas encore. Ils représentent sans doute plus de 99 % de toute la vie de la planète; ce sont eux qui en assurent le fonctionnement géophysiologique et par voie de conséquence déterminent notre survie.
Je ne suis pas trop inquiet pour cette biodiversité-là : elle en a vu d’autres, s’adaptant au gré des bouleversements, des extinctions, des explosions de vie dont la Terre a le secret. En revanche, ce qui m’inquiète, c’est notre place à nous, les humains, espèce invasive, ravageuse, destructrice. Nous sommes bien capables de donner la main à la prochaine extinction massive et nous seront aux premières loges pour en profiter.
Yves Le Gal
Sous-Directeur honoraire au Collège de France
Laboratoire de Biologie Marine
F-29900 CONCARNEAU
L'EDITO # 7
Par Alain Dréano
En cette période de fin d’année, l’huître prend une place particulière sur nos tables. Tout le monde lui reconnaît de multiples vertus : produit naturel, sain, bon pour la santé, ….
Les amateurs vous diront qu’ils préfèrent les huîtres de tel secteur plutôt que celles d’un autre, qu’ils mangent plus volontiers des petites que des grosses ou encore qu’ils les apprécient bien charnues, …
L’huître nous dévoile une palette de saveurs, de formes, de couleurs, … mais comment arrive-t-on à une telle variété ?
Certes, le savoir faire des producteurs intervient directement. Cependant, leur « humble » travail d’accompagnateur de la nature s’intègre dans un processus naturel bien plus complexe.
En effet, la reproduction, la croissance, la couleur, le goût, … sont indiscutablement liés à la qualité, la quantité et la diversité du plancton disponible sur les zones de production.
Les huîtres (mollusques filtreurs) ont besoin de cet aliment « fourrage » qu’est le plancton. Pour se développer, celui-ci a besoin de lumière et de sels nutritifs : il est donc fortement dépendant de la composition du milieu dans lequel il vit.
Sa présence, sa qualité et son abondance sont intimement liées aux apports telluriques des bassins versants situés en amont. C’est pourquoi les sites conchylicoles se trouvent principalement dans des baies ou des zones d’estuaire, là où les apports d’eaux douce sont suffisants pour permettre un développement optimal du plancton et donc des coquillages-consommateurs.
Le plancton joue donc un rôle primordial pour l’huître : il sert de ressource trophique et il lui donne ses caractères organoleptiques.
Perturber cette alchimie revient à fragiliser directement la chaîne trophique du milieu aquatique. C’est pourquoi, les professionnels, les collectivités mais également tout citoyen doivent être particulièrement attentifs à ce qui se passe et à ses pratiques en amont des espaces littoraux, afin de préserver ce fragile équilibre indispensable à la vie marine, à la conchyliculture et en particulier en cette période de fin d’année, aux amateurs d’huîtres.
L'EDITO # 6
Des milliards de milliards d’êtres vivants nous côtoient à chaque fois que nous nous allons nous baigner. Nous n’en avons cure, tant ils semblent minuscules et insignifiants, pour tout dire inutile. Et puis me direz-vous un peu plus, un peu moins, quelle importance ? Ces animaux planctoniques, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, sont si nombreux, dans un océan quasiment infini, au regard de l’homme.
Arrêtons nous un instant sur leur rôle : brique élémentaire de la vie marine, ils sont le premier pas de la chaîne alimentaire, sans laquelle il n’y a ni poissons si bons pour notre santé ou indispensable à notre survie, ni ces délicieuses huîtres, ni ces magnifiques oiseaux, ni ces mammifères marins qui nous font rêver au point d’être parfois élevé à la dimension de dieux. Sans le plancton il n’y a pas non plus de séquestration de ces fameux gaz à effets de serre qui nous inquiètent tant (leur action de photosynthèse piège le CO2 atmosphérique pour le transférer dans les grandes profondeurs pour des millénaires).
S’il n’y avait pas eu de plancton, il y a des millions d’années, nous n’existerions pas, puisque nous sortons de l’océan. Sans lui, nous ne survivrons pas.
Pourtant, comme tous les équilibres de la vie, le plancton est fragile. Ingrats ou aveugles que nous sommes, de scier cette branche fondamentale. Les polluants déversés par centaines de millions de tonnes l’intoxiquent. Les aménagements, assèchements de marais côtiers, agriculture intensive, pratiques de pêche ou d’élevage le fragilisent. Le réchauffement climatique acidifie l’océan, dissous le carbonate de calcium qui le constitue en grande partie. Dans de nombreux endroits la côte d’alerte est atteinte et se traduit en zones mortes, totalement abiotiques, dont le nombre ne fait que croître.
Oui, nous avons le pouvoir de détruire cet immense réservoir de vie. Est-ce cela que nous voulons ? Sans doute pas !
Est-il encore temps d’agir ? Sans doute, à condition de commencer très vite.
Comment faire ? en diffusant la connaissance de ces mécanismes, en réunissant les acteurs pour identifier problèmes et solutions, en incitant à une volonté politique.
Beaucoup de travail…
beaucoup d’espoirs ……
impossible de baisser les bras.
Isabelle Autissier
L'EDITO # 5
Quelque part de l’autre coté du monde.
C’était une nuit que nous avons vécu il y a quelques mois à l’extrême ouest de la Papouasie. La baie de Teluk est un endroit unique où la mer rentre à plus de cinquante kilomètres au cœur de l’île de Waigeo.
Nous avons embarqué dans une petite pirogue de quelques mètres de long pour rejoindre le lieu de pêche. Assis sur la plateforme de bambou, on file au raz de l’eau. La nuit est noire, au-dessus de nous on distingue l’ombre des montagnes karstiques qui encerclent notre petite embarcation instable. L’atmosphère est « étrange ».
On est comme fasciné par les lueurs qui sortent de l’eau au passage de la pirogue, l’écume formée est éclairée de mille étoiles filantes vertes. Des petits êtres qui grouillent là-dessous et qui s’illuminent.
Bercés par ce spectacle, on perçoit soudain des éclairs verts plus importants autour du bateau. De grosses boules de lumière apparaissent puis s’évanouissent aussitôt. À ces heures tardives, on se rapproche de l’hallucination.
Nous comprenons finalement que ce sont les poissons que nous venons pêcher qui, en s’écartant du sillage, animent le plancton. C’est progressivement un feu d’artifice qui se joue juste sous la surface.
Plus tard, nous apprendrons que, de nuit, les habitants de la baie pêchaient à la sagaie ces boules de lumières ; c’était avant l’arrivée des lampes à pétrole. Guidés uniquement par la lueur verte, ils sautaient dans l’eau en espérant transpercer le poisson fuyard.
Un bel exemple de relation entre l’homo sapiens et cette grande soupe de vie dont il dépend.
Sébastien Thiébot & Cécile Carduner
Retrouver le projet Symbiose en Indonésie sur www.symbiose.aquasapiens.fr
L'EDITO # 4
Septembre arrive, avec son rituel lot de pluies qui marqueront la fin de la saison de sel.
Comme depuis toujours, les paludiers ont tâché de vivre en symbiose avec la nature et les éléments pour produire ce bon sel, dit de Guérande. La cuvée 2009 s’annonce plutôt correcte, tant en fleur de sel qu’en gros sel et gratifie le paludier pour ces longs mois de travail de préparation dans ses salines.
Mais le Marais Salant, à vrai dire, ne produit pas que du sel ; en effet, en favorisant une importante production de plancton, il constitue une véritable « nursery » naturelle qui, en enrichissant le milieu marin, a un effet positif en chaîne sur les activités des conchyliculteurs et des pêcheurs de notre région.
Grâce à ce territoire (encore récemment menacé de disparition) et à son précieux savoir-faire, nous avons pu créer l’association Univers-Sel qui nous permet d’accompagner nos collègues du Sud (Guinée, Bénin) par un vrai échange de producteurs à producteurs et dans le respect indissociable de l’humain et de l’environnement.
Quand on sait que la technique ignigène traditionnelle de production de sel consomme 3 T. de bois pour obtenir 1 T. de sel, on réalise que les 1500T. de sel solaire produites cette année en Guinée ont permis d’éviter le prélèvement sur la mangrove d’au moins 4500T. de bois…sans parler de l’économie de l’achat de ce même bois pour les producteurs et de l’impact sur la bonne santé du plancton de la mangrove !
De par notre technique de gestion de l’eau (qui est au cœur de notre métier de paludier), nous avons pu offrir un appui effectif à la riziculture de mangrove : par exemple cette année, et grâce à une solide dynamique paysanne, 900 Ha de rizières ont été réhabilitées, portant les surfaces à un total de 7000 Ha depuis que nous travaillons en Guinée, avec une augmentation de rendement de + 1 T. à l’Ha . Le tout bien sûr, cerise sur le gâteau, en culture biologique… Merci la mer nourricière ! En toute humilité, ça commence à avoir de la gueule tout ça…
Un grand salut des Salines de Guérande !
Amitiés salées,
Alain Courtel
L'EDITO # 3
Par Jacqueline Goy
Plancton et méduse, c’est synonyme tant la méduse est adaptée à vivre en pleine eau et devient un symbole des organismes pélagiques. Constituée à 98% d’eau, avec une densité voisine de celle de l’eau de mer, elle a un corps mou, gélatineux, non protégé par une carapace ou par une coquille et sa forme d’ombrelle est un autre avantage.
La morphologie présente une organisation rayonnée, avec au centre la bouche dont les quatre lèvres ou bras oraux, pendent sous l’ombrelle, et un estomac d’où partent des canaux radiaires rayonnant dans l’épaisseur de l’ombrelle dont le bord est orné de tentacules tapissés par des cellules urticantes.
Ces cellules se caractérisent par une énorme vacuole, capsule à paroi rigide qui renferme un filament barbelé enroulé en spirale baignant dans un liquide toxique. Les tentacules étirés fonctionnent comme un filet de pêche : dès qu’une proie est touchée les cellules urticantes éclatent, libérant le filament barbelé qui s’accroche à la proie et lui inocule la toxine paralysante.
Les minuscules animaux du plancton servent de nourriture : œufs et larves de poissons, petits crustacés, vers marins. Les méduses carnivores occupent une place importante dans l’économie des mers et entrent en compétition avec les autres carnivores dont les poissons. Or, la surpêche a déséquilibré le milieu et les méduses profitent de cette surabondance, elles se multiplient jusqu’à transformer certaines aires marines en soupe de méduses.
On a là, un bon exemple de l’impact des activités humaines sur le fonctionnement des océans.
L'EDITO # 2
Par Paul Tréguer
Le phytoplancton joue un rôle unique pour le cycle du carbone de la planète Terre. Sa biomasse totale est faible (3 milliards de tonnes de carbone) par rapport à celle des végétaux terrestres (600 milliard de tonnes), par contre la production totale annuelle du phytoplancton (50 milliards de tonnes) est équivalente à celle de la biomasse terrestre (forêts et autres végétaux).
Ceci signifie que le phytoplancton marin se renouvelle très rapidement (environ toutes les 3 semaines) par rapport aux plantes terrestres (environ tous les douze ans). A travers la photosynthèse les micro-organismes qui constituent le phytoplancton apportent une contribution essentielle au cycle global du dioxyde de carbone. Les espèces composant le phytoplancton marin sont fascinantes à maints égards.
Celui ou celle qui a la chance d’examiner à travers un microscope les délicats arrangements de verre de diatomées géantes peut passer des heures, pour le seul plaisir des yeux.
Les images de diatomées en microscopie électronique s'apparenter à de véritables tableaux d'artistes. Les coccolithophoridés, protégées par leurs assemblages de carbonate de calcium, sont détectables depuis l’espace par satellite. Mais ce sont des arrangements fragiles, menacés par l’ « acidification » d'un océan de plus en plus enrichi en dioxyde de carbone d’origine anthropique.
L'EDITO n°1
par Pierre Mollo
Parent pauvre de la biodiversité, patrimoine naturel commun de plus de 3,5 milliards d'années, le plancton a survécu à tous les cataclysmes. Animal comme végétal, il rassemble d’innombrables organismes aquatiques errant dans les eaux de la planète bleue. Il est la partie intime, invisible de la plus grande biodiversité de la planète.
Pourtant essentiel, le plancton reste un sujet d'actualité trop souvent méconnu. De multiples agressions pèsent sur les équilibres sensibles des écosystèmes marins et planctoniques en particulier. Placer le plancton au centre du débat est une initiative qui permettra de réunir sur la toile connaissances, témoignages et échanges sur la fragilité de ces microorganismes.
Avec le soutien d’Océanopolis et de la Fondation pour le Progrès de l’Homme, nous souhaitons rapprocher les citoyens des enjeux importants du plancton et de sa diversité pour notre planète.
L'intérêt d'un tel projet est d'accompagner des initiatives originales, qu'elles soient scientifiques, professionnelles, artistiques, éducatives, citoyennes… Nous souhaitons que dans chaque lieu d'observation, celle-ci devienne un motif à discussion, échange et partage. Toutes les initiatives qui nous parviendrons seront mutualisées et organisées afin d’être accessibles au plus grand nombre.
A travers ses différentes rubriques, ce site vous fera découvrir le plancton et ses enjeux ; et apprécier sa beauté et sa richesse.
En savoir plus
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Un nouveau film sur la diatomite dans la rubrique Ressources/Videos
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Diatomées fossiles :
Nom du site...
Le saviez vous...
Découvert seulement dans les années 70, le picoplancton qui rassemble des organismes de très petite taille (entre 0.2 et 2-3 µm) est si petit qu’il ne peut être regardé à l’aide d’un microscope. Il est étudié grâce à des techniques beaucoup plus précises. Avant sa découverte, on pensait que les zones centrales des océans, qui sont très pauvres en sels nutritifs (dites oligrotrophes), étaient dépourvues de phytoplancton. Or des découvertes successives ont permis de prouver le contraire, et de...